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Qu’étaient les pensionnats autochtones au Canada?
Les pensionnats autochtones faisaient partie d’un système créé pour assimiler culturellement les enfants autochtones et les obliger à s’adapter à la société euro-canadienne.
Les pensionnats ont été établis durant les années 1870 par le gouvernement canadien et étaient administrés par les églises catholique, méthodique, anglicane, presbytérienne et unie. Le dernier est resté ouvert jusqu’en 1996.
Les enfants autochtones étaient enlevés de force de leurs foyers familiaux et envoyés dans ces pensionnats, où on les isolait complètement de leurs familles. Les premiers pensionnats séparaient les enfants selon leur genre, ce qui éloignait davantage les frères et les soeurs.
Le but des pensionnats autochtones était de convertir les enfants autochtones au christianisme, de les dépouiller de leur culture, valeurs et comportements sociaux, et de les “occidentaliser”. Les missionnaires et colons européens percevaient les autochtones comme des “sauvages” et croyaient que la civilisation occidentale était supérieure.
Le processus d’assimilation commençait dès que les enfants arrivaient aux pensionnats : leurs cheveux étaient coupés, on leur enlevait leurs tenues traditionnelles et on leur donnait un nouveau nom ou un numéro comme forme d’identification. Ils devaient se conformer à des horaires quotidiens strictes qui comprenaient principalement du travail manuel. On interdisait aux enfants de parler leur langue, même dans le peu de communications écrites avec leurs familles accordées à certains enfants. Le personnel des écoles abusait des enfants physiquement, sexuellement, émotionnellement et psychologiquement.
En 1920, Duncan Campbell Scott, le superintendant adjoint au département des Affaires indiennes, amende la Loi sur les Indiens et rend la fréquentation des pensionnats autochtones obligatoire pour tous les enfants autochtones. Il était dès lors illégal pour eux de fréquenter quelconque autre type d’école.
“Je veux me débarrasser du problème autochtone. Je ne crois pas, justement, que ce pays doive continuer à protéger une classe de personnes parfaitement capables de se prendre en charge. Voilà tout l’objet de mon propos… Notre objectif est de continuer jusqu’à ce qu’il n’y ait plus un seul Autochtone au Canada qui n’ait pas été assimilé dans le corps politique, qu’il n’y ait plus de question autochtone ni de ministère des Affaires indiennes. Voilà l’objectif du projet de loi.” - Duncan Campbell Scott
Approche autochtone de l’apprentissage
Les sociétés autochtones nord-américaines apprenaient à travers la narration et la transmission des valeurs culturelles. On leur enseignait aussi les techniques nécessaires à la survie au quotidien. Bien qu’il existait de nombreuses différences entre les différents groupes autochtones, ils partageaient néanmoins certaines points communs :
- Les enfants apprenaient de manière non-structurée et sans l’utilisation de la force
- La coopération, la coexistence et la compétence étaient des piliers fondamentaux de l’éducation
- Les apprentissages se déroulaient dans la vie quotidienne
- La narration et le rôle des aînés partageant leur sagesse étaient au coeur de l'apprentissage
Les externats autochtones fédéraux
L’éducation occidentale au Canada a commencé au 17ème siècle avec l’établissement d’écoles missionnaires chrétiennes au Québec. Les ordres religieux qui étaient venus au Canada voulaient convertir, ou "évangéliser” et “civiliser” les peuples autochtones.
L’existence des externats autochtones fédéraux précède celle des pensionnats. Ces écoles étaient gérées par le gouvernement et avaient pour but de dépouiller les enfants autochtones de leurs cultures, leurs langues et leurs traditions. Elles étaient également des lieux de violence et d’abus.
La plupart des enfants des Premières Nations, Métis et Inuit fréquentaient des externats situés dans les réserves ou à proximité. Contrairement aux pensionnats, les enfants fréquentaient les cours durant la journée et rentraient chez eux auprès de leurs familles le soir. On estime qu’il y avait plus de 700 externats autochtones à travers le Canada.
L’histoire des pensionnats autochtones
Bien que les externats et pensionnats autochtones existaient déjà au début du 19ème siècle, le système scolaire des pensionnats, lui, fut mis en place en 1867, après la Confédération du Canada (ou l’unification de trois colonies de l’Amérique du Nord britannique sous le nom de Dominion du Canada).
Sir John A. Macdonald, le 1er premier ministre du Canada, fut l'architecte du système scolaire des pensionnats autochtones. Le gouvernement cherchait alors à coloniser ce qui est aujourd’hui l’Ouest du Canada, ce qui a été notamment fait à travers des traités et politiques permettant l’expulsion des peuples autochtones de leurs terres pour laisser place aux colons.
À la suite de l’expansion de ce type d’école dans l’Ouest, leur taille a significativement augmenté, certains pensionnats comptant plus de 500 enfants. Cette expansion territoriale a conduit l’État à formaliser son partenariat avec l’Église. Le gouvernement fédéral finançait les écoles tandis que l’Église assurait leur direction et leur fonctionnement.
Chronologie historique
- 1844-1846 - Egerton Ryerson, superintendant de l’éducation du Haut-Canada (ancienne colonie britannique), préconise la création d’un système de pensionnats autochtones.
- 1867 - La Loi constitutionnelle de 1867 - Le gouvernement fédéral s’empare de l'autorité qu’avait la Couronne britannique sur les Premières Nations et les réserves.
- 1876 - La Loi sur les Indiens - Cette loi est créée pour dépouiller les peuples des Premières Nations de leur culture et les obliger à ressembler davantage aux Euro-Canadiens.
- 1883 - Sir John A. Macdonald autorise la création des pensionnats autochtones dans l’Ouest, même si ceux-ci y existaient déjà depuis des décennies.
- 1884 - Des modifications à la Loi sur les Indiens appuient la création des pensionnats autochtones à travers le financement et la direction du gouvernement du Canada et des églises catholique, anglicane, presbytérienne, méthodiste et unie. Le gouvernement interdit également les cérémonies autochtones traditionnelles.
- 1896 - Le nombre de pensionnats continue à augmenter. Il y en a désormais plus de 40 à travers le Canada. Les pensionnats reçoivent une allocation par enfant, ce qui mène à un surpeuplement et une prolifération de maladies infectieuses.
- 1913-1932 - Duncan Campbell Scott, un fonctionnaire assimilationniste extrémiste, est chargé des affaires autochtones tout au long de sa carrière. Il est responsable de la gestion du système des pensionnats à son apogée. Il a des positions très radicales sur les peuples autochtones et est associé à la phrase “tuer l’Indien, sauver l’homme”. Son objectif était de continuer “jusqu’à ce qu’il n'y ait plus un seul Indien au Canada”.
- 1996 - Le dernier pensionnat autochtone financé par l’État ferme ses portes à Punnichy, en Saskatchewan.
Plus de 150 000 enfants autochtones âgés de 4 à 16 ans ont fréquenté les pensionnats autochtones au Canada.
Que se passait-il dans les pensionnats autochtones?
Les survivants qui fréquentaient ces écoles se souviennent d’expériences extrêmement négatives et traumatisantes. L’éducation dans les pensionnats autochtones était basée sur la discipline militaire : les enfants étaient obligés de travailler durant la moitié de la journée et suivaient des cours durant l’autre moitié. Ils étaient assignés à travailler dans les champs ou dans les cuisines, ou chargés de lessives ou de travaux de charpenterie. De plus, on attendait des enfants plus âgés qu’ils s’occupent des plus jeunes. Le mandat du gouvernement était d’économiser de l’argent en utilisant de la main d'œuvre infantile gratuite, ce qui menait inévitablement à des résultats éducatifs médiocres.
La distribution du travail entre les enfants était basée sur le genre. Il arrivait souvent que les garçons passent un temps significativement long à travailler dans les champs tandis que les filles passaient la majorité de leur temps à effectuer des tâches domestiques. Les travaux étaient supervisés par le personnel de l’école qui avait l’habitude de battre les enfants à la moindre altercation, afin de s’assurer qu’ils respectent leurs règles strictes.
Les emplois dans les pensionnats autochtones suscitaient l’intérêt d’individus au caractère douteux, que ça soit pour cause de négligence et de paresse ou, plus sinistrement, de criminalité et de prédation. Il n’y avait pas de standards de recrutement pour le personnel. Celui-ci n’était pas tenu d’avoir une quelconque qualification pour y travailler. Il n’était pas non plus attendu d’eux qu’ils produisent des certificats professionnels ou aient suivi une formation. Ils recevaient généralement de faibles rémunérations pour effectuer ce travail. Aucun effort n’était fait pour retirer les agresseurs du système.
Abus
Il y avait de la négligence persistante et des abus débilitants dans les pensionnats autochtones. Des milliers d'élèves y ont subi différentes formes de torture physique et mentale.
Le personnel critiquait et dénigrait les traditions spirituelles autochtones des enfants de manière régulière. Si ceux-ci essayaient de parler leur propre langue ou de faire allusion à leur culture d’une quelconque façon, le personnel les battait ou leur infligeait d'autres formes extrêmes de violence physique et mentale.
Les conditions de santé dans les pensionnats étaient extrêmement mauvaises. Les écoles étaient sous-financées et surpeuplées et connaissaient en permanence des problèmes sanitaires. Elles représentaient un terreau fertile pour les maladies infectieuses. Les niveaux élevés de stress et de malnutrition nuisaient également à la santé des enfants. De nombreux enfants sont morts de faim ou du fait des épidémies récurrentes de tuberculose, de grippe et de rougeole qui balayaient ces institutions mal entretenues. Beaucoup d'autres sont morts à la suite des abus et de la négligence auxquels ils étaient soumis. Un grand nombre de ces enfants furent enterrés dans des tombes anonymes.
Malgré la fermeture du dernier pensionnat en 1996, les abus subis par les élèves continuent à avoir de graves conséquences physiques et mentales sur les générations actuelles de personnes autochtones, dû à ce qu’on appelle le traumatisme intergénérationnel. Les traumatismes vécus étaient d’une telle ampleur qu’il était difficile pour les survivants de vivre une vie épanouie à leur sortie des pensionnats. Les experts en santé mentale estiment que les effets physiques et mentaux de traumatismes peuvent être ressentis jusqu’à six générations après.
Bien que les registres soient incomplets, on estime qu'au moins 6 000 enfants sont morts dans les pensionnats, et beaucoup ont ensuite été cachés et enterrés dans des tombes anonymes. On continue à découvrir des restes d’enfants dans des cimetières anonymes à travers le pays, ce qui a récemment déclenché une enquête plus approfondie. Néanmoins, il y a encore énormément de choses que nous ne savons pas sur les enfants qui sont morts dans les pensionnats.
En 2015, la Commission de vérité et réconciliation a déterminé que le système des pensionnats équivalait à un génocide culturel. Les découvertes récentes de corps d’enfants ont mené de nombreux groupes autochtones à estimer que ce génocide ne pouvait plus uniquement être qualifié de culturel.
Commission de vérité et réconciliation
La Commission de vérité et réconciliation du Canada (CVR) a été créée en 2008 par le gouvernement fédéral pour favoriser la guérison du traumatisme intergénérationnel vécu par les personnes autochtones touchées directement ou indirectement par les séquelles des pensionnats et des autres atrocités vécues par les Premières Nations, Inuit et Métis. L’objectif principal de la CVR est d'enregistrer et de communiquer la vérité sur les pensionnats autochtones et les politiques qui ont eu un impact négatif sur les communautés autochtones.
Les externats ne font pas partie du processus de Réconciliation en raison du recours collectif des externats indiens fédéraux approuvé par la Cour fédérale du Canada en 2019 pour indemniser les survivants. Un Fond de legs a été mis en place pour soutenir des projets de commémoration, des programmes de santé et de bien-être, des événements de « vérité » et la restauration et la préservation des langues et de la culture autochtone.
Pour une liste complète des pensionnats autochtones qui existaient en Ontario et à travers le Canada, visitez la page residentialschoolsettlement.ca.
Dernière mise à jour :
janvier 6, 2022
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